http://www.oclc.org/reports/2005perceptions.htm
C'est le titre d'une enquête de l'OCLC menée via internet auprès de 3300 personnes anglophones (Etats-Unis, Grande-Bretagne, Canada, Autralie, Inde, Singapour).
La conclusion de l'OCLC est que l'image des bibiothèques est positive mais vieillie (car associée aux livres et non pas aux bases de données) et qu'il faut donc communiquer plus et "rajeunir la marque " (rejuvenate the brand).
Recension et commentaires.
MOTEURS DE RECHERCHE VS BIBLIOTHECAIRES ?
* 84% des personnes interrogées commencent une recherche électronique par un moteur (et parmi ceux-ci, par Google à 62%).
[Résultat à nuancer selon moi par le fait qu'on a interrogé exclusivement des internautes, et exclusivement via internet.]
* Qu'elle provienne d'un moteur ou d'un bibliothécaire, l'information trouvée est jugée de qualité équivalente par les usagers : satisfaction de l'ordre de 53%.
* 77% des interrogés admettent que le bibliothécaire apporte de la valeur à la démarche de recherche, mais uniquement 44% disent qu'il apporte plus d'aide qu'un moteur.
Les bibliothèques l'emportent légèrement en précision et en crédibilité, mais elles perdent sur le plan de la facilité et l'accessibilité.
*Sur l'expérience globale de recherche 60% d'utilisateurs sont très satisfaits par les moteurs et 48% par les bibliothèques.
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L'HABITUDE DE L'INTERNET
*Les moteurs "correspondent parfaitement à mon style de vie" pour 56% des internautes, ils ne sont que 18 % à dire la même chose des bibliothèques.
[Là encore il faut rappeller qu'on a interrogé uniquement un public déjà familier à internet.]
*13% seulement ont déjà payé pour obtenir une information en ligne,
et l'ensemble des personnes interrogées ne s'attendent pas à dépenser plus dans l'avenir [gniark gniark gniark].
* pour valider une information provenant d'internet, 82% opère un croisement avec un autre site internet, 68% avec une source imprimée.
*depuis qu'ils utilisent internet, ils consacrent moins de temps à la télévision (39%), aux bibliothèques (33%) et à la lecture (26%), suivis par les magasins et la radio.
LES SITES DE BIBLIOTHEQUES : SOUS-UTILISES
* A la question "La prochaine fois que vous chercherez de l'information, quelles sources envisagerez-vous?" Les internautes répondent : pour 91% les moteurs, 55% les bibliothèques, 37% les bibliothèques en ligne, 42% les librairies, 30% les libraries en ligne.
* La moitié des personnes interrogées ont déjà commencé une recherche sur un moteur qui a abouti sur un site de bibliothèque.
* Les sites de bibliothèques sont faiblement utilisés (27%), surtout comparé au pourcentage de personnes qui sont inscrites dans une bibliothèque (72%) ou qui s'y rendent régulièremement (un tiers au moins une fois par mois).
* Le service en ligne le plus connu et le plus utilisé : le site et le catalogue.
Le moins connu : les questions à distance.
LES USAGES DE LA BIBLIOTHEQUE
* 1/3 des interrogés seulement ont déjà demandé de l'aide à un bibliothécaire durant une recherche d'information.
[L'OCLC en déduit qu'ils aiment le self-service. Mais si ont regarde le détail des réponses, on voit aussi que ce sont surtout les plus jeunes et les plus diplômés qui ont déjà demandé de l'aide].
* Un quart des inscrits en bibliothèque et plus de la moitié des non inscrits ne se tiennent pas au courant des ressources disponibles en bibliothèques.
*Sont connotés plutôt positivement : les produits offerts en bibliothèque(et le personnel), plutôt négativement : les services et les espaces.
*Quand ils pensent à une bibliothèque, pour 69% ce qui vient à l'esprit en premier: des livres (suivi de l'information et du bâtiment lui-même).
Ceci est analysé de manière quasiment négative dans les commentaires de l'OCLC, car ceci montrerait que les usagers n'ont pas assez conscience des autres ressources.
*Pourtant quand on leur demande quel est le but principal de la bibliothèque : 53% des réponses tournent autour de l'accès à l'information en général, et 31% seulement tournent spécifiquement autour des livres.
* Quand ils ont des conseils à donner à la bibliothèques, les usagers répondent [de manière traditionnelle dans ce genre d'enquête] qu'il faut "plus" et "plus facilement".
"RAJEUNIR LA MARQUE" (REJUVENATE THE BRAND)
L'OCLC conclue que les bibliothèques ont une bonne image de marque, et qu'il faut se baser dessus, s'appuyer dessus, pour la rajeunir. Mais c'est ambigu car cette image est celle d'un lieu familier, avec la présence de livres, ce qui rend difficile la représentation des offres de bases de données (qui sont uniquement connues des étudiants).
Les gens y sont attachés comme à un lieu d'information gratuite en libre service [car, selon l'OCLC, ils auraient confiance en eux] et disent vouloir y trouver plus de livres encore.
Les bibliothèques sont "un endroit pour apprendre, pour lire, pour trouver de l'information gratuitement, pour aider l'instruction, pour aider à s'informer, et avec des ordinateurs gratuits".
MON COMMENTAIRE
Je ne sais pas si le terme brand (qui signifie marque commerciale) a des connotations vraiment plus larges en américain qu'en français (image de marque, identité, concept?).
En tout cas l'angle choisi par l'OCLC est bien de montrer que pour l'usager les bibliothèques sont en concurence avec de nouvelles offres issues du privé, et qu'elles le seront sans doute de manière croissante. C'est intéressant.
Cependant, cela me gêne de placer la stratégie des bibliothèques exactement sur le même plan que les offres privées, car cela signifierait que le service public est juste un concept commercial (a brand) inventé par le lobby des fonctionnaires bibliothécaires pour justifier l'existence de leurs postes. Certes, la communication autour d'un service est important pour que celui-ci soit bien utilisé, mais ce qui me dérange c'est que l'OCLC parle de "changer l'image" comme étant un but en soi.
On dirait que l'on se place sous l'injonction "il FAUT que les gens utilisent plus la bibliothèque" avant de se demander d'abord en quoi les gens pourraient en retirer un service supérieur.
Par exemple, c'est normal que les gens qui ne sont pas étudiants n'aient pas d'image concrète des bases de données, s'ils n'en ont pour le moment aucun usage concret.
Bref pour moi
1/Cette enquête est intéressante : le profil des internautes qu'elle interroge va sans doute se généraliser rapidement dans les pays occidentaux.
2/Mais on ne peut pas en tirer directement de plan d'action pour les bibliothèques (sinon ce serait tomber dans le communicationnel pur).
Il faut passer par une réflexion sur les contenus : en prenant acte de l'offre internet, en quoi (et à quels frais) les bibliothèques gardent précisément des ressources spécifiques intéressantes à développer ?
Et sur un plan politique : pour quelles ressources estime-t-on primordial l'accès public et gratuit?